Les principales dispositions de la loi Engagement National pour le Logement dite ENL n° 2006-872 du 13 juillet 2006

 

La loi, portant engagement national pour le logement, dite ENL, est avant tout une loi politique prise pour inciter les propriétaires à louer des logements. C'est également une loi qui retouche de ci et de là certains domaines pour répondre à des demandes de professionnels, les mettre en adéquation avec la jurisprudence ou au contraire mettre à néant, une jurisprudence que le législateur ne voulait pas voir perdurer.

 

Ainsi, cette loi prévoit un grand nombre de dispositions d'urbanisme, en droit immobilier, relatives aux baux d'habitation, au droit de copropriété, et à la fiscalité.

 

L'objet de cet article n'est pas de les reprendre toutes, mais de résumer les principales dispositions.

 

I- Le droit de l'urbanisme

1°) Délai de retrait


Le délai de retrait du permis de construire passe de quatre à trois mois. Passé ce délai le permis ne peut être retiré que sur demande de son bénéficiaire. L'application de cette nouvelle mesure reste conditionnée par la publication d'un décret d'application.

 

2°) Constructions irrégulières


Le nouvel article L 111-12 du Code de l'Urbanisme prévoit que "Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de 10 ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme."

 

Toutefois, il existe 6 exceptions :

 

Lorsqu'une construction est de nature, de par sa situation à exposer à un danger de mort ou blessure ( par ex : couloir d'avalanche),

 

- si une action en démolition a été engagée,
- si la construction est située en site classé ou parc naturel,
- si la construction est sur le domaine public,
- si la construction a été réalisée sans permis,
- si la construction est située dans une zone de danger relevant d'un plan de prévention des risques naturels.

 

C'est donc l'irrégularité de la construction par rapport aux règles d'urbanisme (quand elles ne sont pas trop graves) ou au permis de construire (non prévu dans les exceptions) qui est visée par la prescription décennale et non l'absence d'autorisation.

 

3°) Droit de préemption urbain

 

Une nouvelle règle a été instaurée pour soumettre au droit de préemption renforcé la cession de la totalité des parts d'une SCI lorsque le patrimoine de la société est constitué par une unité foncière dont la cession serait soumise au droit de préemption.

 

Il faut donc qu'il y ait :

 

- un droit de préemption renforcé,
- la cession de la totalité des parts d'une SCI,
- la société ne doit posséder qu'une seule unité foncière,
- la société ne doit pas posséder d'autres biens (immeubles ou droits sociaux)

 

Son entrée en vigueur est immédiate.

 

4°) Affectation


La loi ratifie l'ordonnance du 8 juin 2005. Rappelons donc que les locaux construits postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction a été autorisée. Ce régime est étendu aux immeubles plus anciens mais ayant fait l'objet de travaux en changeant la destination.

 

Les sanctions pénales sont majorées.

 

5°) Risques naturels

 

Une nouvelle disposition permet d'imposer dans les zones exposées aux risques sismiques ou cycloniques des règles de construction parasismiques ou paracycloniques. Elle impose au maître d'ouvrage de délivrer à l'administration un document établi par un contrôleur technique attestant que le maître d'ouvrage a tenu compte de ses avis.

 

6°) Annulation partielle d'un permis


Dorénavant, le nouvel article L 600-5 du Code de l'urbanisme accorde au juge administratif la faculté de prononcer une annulation partielle d'un permis de construire, s'il constate que seule une partie du projet est illégale.

 

7°) Action en démolition


Un propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à démolir ses constructions du fait de la méconnaissance de règles d'urbanisme que si au préalable le permis de construire a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative. La demande en démolition devant les tribunaux judiciaires ne peut être faite que pendant un délai de deux ans à compter de l'annulation du permis de construire.

 

Rappelons que jusqu'à présent, une telle action devait être intentée dans les 5 ans de l'achèvement des travaux et était subordonnée à l'annulation ou à la déclaration d'illégalité du permis par le juge administratif. Désormais une simple déclaration d'illégalité ne suffit plus.

 

Seule l'annulation pour excès de pouvoir est nécessaire et suffisante, pour permettre l'action en démolition, dans un délai de 2 ans à compter de l'annulation du permis et non plus de 5 ans à compter de l'achèvement des travaux.

 

Cette action civile en démolition est ouverte au Préfet, dans les mêmes conditions en cas d'annulation d'un permis sur déféré préfectoral, pour un motif non susceptible de régularisation.

 

En l'absence de recours préalable en annulation du permis, la seule action qui pourra être intentée sera une action en dommages et intérêts qui devra être engagée dans les 2 ans de l'achèvement des travaux. Cette nouvelle règle s'applique aux constructions achevées depuis le 16 juillet 2006.

 

8°) Recours des association


Dorénavant une association ne sera recevable à agir contre une décision relative à l'occupation des sols que si le dépôt des statuts de l'association ou l'agrément est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. Ceci pour éviter la constitution d'association de défense de quartier au dernier moment.

 

II- Le droit immobilier

1°) Droit de rétractation


Suppression du délai de réflexion pour les avants contrats. Ceux-ci seront donc uniquement soumis au droit de rétractation, qu'ils soient rédigés sous forme authentique ou sous seings privés.

 

Le délai de réflexion ne subsiste donc qu'en cas de vente directe sans avant contrat préalable.

 

La loi ajoute un alinéa qui précise que dans le cas où l'acte est conclu par l'intermédiaire d'un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, l'acte peut être remis directement en mains propre au bénéficiaire du droit de rétractation.

 

2°) Vente d'immeuble à rénover

 

Création d'un nouveau type de contrat.

 

Le régime de la vente d'immeuble à rénover s'applique :

 

- à toute personne qui vend tout ou partie d'un immeuble bâti et qui s'engage à réaliser des travaux dans un certain délai et qui perçoit des sommes d'argent avant la livraison des travaux,
- aux immeubles à usage d'habitation, à usage mixte professionnel et d'habitation ou qui sera destiné après la rénovation à l'un de ces usages,
- ne s'applique pas aux travaux d'agrandissement ou de restructuration complète d'un immeuble qui continueront à relever de la réglementation de la vente d'immeuble à construire.

 

Le régime de ce nouveau contrat est fortement inspiré de la vente en l'état futur d'achèvement :

 

- Transfert de la propriété au jour de la vente sur les constructions existantes et au fur et à mesure, sur celles futures,
- Le vendeur demeure maître d'ouvrage jusqu'à la réception des travaux,
- les vices de construction ou défauts de conformité doivent être dénoncés dans l'acte de livraison ou dans le mois après la livraison,
- le vendeur reste tenu de la garantie décennale et de la garantie biennale pour les éléments d'équipement,

- Recours à un acte authentique à peine de nullité,
- possibilité de modalité de révision du prix par référence à un indice du bâtiment,
- le paiement du prix s'effectue au fur et à mesure de l'avancement des travaux,
- la vente doit mentionner au minimum les stipulations suivantes, à peine de nullité du contrat :

. description et caractéristiques de l'immeuble,
. surface loi carrez,
. description des travaux à réaliser,
. délai de réalisation de ces travaux,
. prix avec caractère révisable ou non,
. justification de la garantie financière,
. justification des assurances responsabilité et dommages ouvrage,
. Règlement de copropriété.

 

Ce texte d'ordre public sera complété par décret .

 

3°) Diagnostic électrique

 

Il est dorénavant imposé, en cas de vente de tout ou partie d'un immeuble d'habitation, la production d'un état de l'installation intérieure d'électricité, lorsque l'installation a été réalisée depuis plus de 15 ans.

 

Si l'immeuble est en copropriété, l'obligation ne portera que sur les parties privatives. A défaut, le vendeur ne pourra s'exonérer de sa garantie des vices cachés à ce titre.

 

Le texte renvoie à un décret.

 

L'état de l'installation intérieure de gaz actuellement exigé pour le gaz naturel le sera pour tout type de gaz, tel le gaz liquide.

 

4°) Loi Hoguet

 

Possibilité pour l'agent immobilier de percevoir des sommes d'argent avant la conclusion définitive d'une opération lorsque celle-ci est réalisée par le mandant dans le cadre d'une activité professionnelle.

 

Ce texte sera également soumis à décret d'application.

 

III- La fiscalité

1°) Taxes sur la plus vlaue des céssion des terrains constructibles

 

Création d'une nouvelle taxe sur la plus value de cession des terrains rendus constructibles, par une décision de la commune, pour assurer un partage de la plus value entre le propriétaire du terrain et la collectivité qui a assumé le coût des équipements publics. Cette nouvelle taxe est laissée à l'appréciation des communes.

 

Certaines cessions en sont exclues :

 

- Dépendances immédiates des résidences principales, terrains remembrés ou expropriés ou dont le prix de cession est inférieur à 15.000€
- Les cessions portant sur des terrains classés constructibles depuis plus de 18 ans,
- Lorsque le prix de cession est inférieur au prix d'acquisition majoré de 200%,

 

La taxe sera égale à (10% d'une base constituée par les 2/3 du prix de cession) à 6,6 % du prix de cession.

 

Elle sera exigible lors de la 1ère cession à titre onéreux du terrain intervenue après son classement en terrain constructible.

 

Cette taxe dont le régime sera précisé par décret s'applique aux cessions intervenues à compter du 1er janvier 2007.

 

2°) Transparence

 

Obligation de transmission par l'Administration fiscale des éléments d'information qu'elle détient sur les valeurs foncières déclarées à l'occasion de mutations intervenues dans les 5 dernières années notamment aux propriétaires faisant l'objet d'une procédure d'expropriation.

 

3°) Majoration de la taxe foncière

 

Majoration de la taxe foncière des terrains constructibles non bâtis. La majoration sera fixée par délibération du conseil municipal, la majoration ne pouvant excéder 3% d'une valeur forfaitaire moyenne au m² définie par décret et représentative de la valeur moyenne du terrain selon sa situation géographique.

 

4°) Taxe locale d'équipement


La taxe locale d'équipement (TLE) est en hausse depuis le 1er janvier 2007.

 

5°) La vente d'une HLM

 

La loi autorise la vente à l'occupant à un prix inférieur de 35% à l'évaluation fournie par le service des domaines. Pour éviter une trop grande plus value par l'acquéreur lors de la revente de son logement dans les 5 ans, l'organisme d'HLM qui doit être informé de la revente peut se porter acquéreur. D'autre part si l'acquéreur initial réalise une plus value importante (le prix de vente dépasse le prix d'achat réactualisé) il doit rembourser une somme égale à la différence entre le prix d'achat et l'évaluation faite lors de l'acquisition soit 35%. Si la plus value est plus modérée (le prix de revente dépasse le prix d'achat mais reste inférieur au prix d'achat réactualisé), il reverse la différence entre le prix d'achat et le prix de vente.

 

6°) Fin du Besson

 

Vive le BORLOO populaire, nouveau dispositif aux conditions de loyers plus strictes !

 

7°) Revenus fonciers

 

Déduction de 30% sur les revenus fonciers pour les logements qui ont donné lieu au paiement de la taxe sur les logements vacants et qui sont remis en location en 2006 et 2007.

 

8°) Taxe d'habitation des logements vacants

 

Elle permet aux communes d'assujettir à la taxe d'habitation les logements vacants depuis plus de cinq ans. Sont exclues les communes concernées par la taxe sur les logements vacants.

 

IV- Les baux d'habitation

1°) Reprise de logements

 

Afin d'éviter la présence de logements affectés à l'usage commercial dans les centres villes, de nouvelles mesures ont été adoptées pour permettre la reprise des locaux d'habitation annexes de locaux commerciaux lorsqu'ils ne sont pas affectés à l'habitation.

 

A l'expiration d'une période triennale, avec préavis de 6 mois, le bailleur peut reprendre les locaux :

 

- si le bailleur veut réaffecter le local d'habitation annexe à cet usage,
- en cas de démolition de l'immeuble dans certaines conditions (projet de renouvellement urbain).

 

Le locataire peut faire obstacle à cette reprise :

 

- si la privation de jouissance des locaux d'habitation annexes apporte un trouble important à l'exploitation du fonds,
- si les locaux commerciaux et d'habitation annexes forment un tout indivisibles.

Certains locaux sont exclus de ce dispositif : hôtels, locations meublées, locaux à usage hospitalier ou d'enseignement.

 

Le loyer est bien évidemment diminué pour tenir compte des surfaces retranchées. Cette reprise ne peut constituer une modification notable pour obtenir un déplafonnement du loyer.

 

2°) Déclaration de mise en location

 

Elle est prévue pour 5 ans. Ne vise que les communes de plus de 50.000 habitants. Le conseil municipal doit prendre une délibération pour l'instituer.

 

Concerne les immeubles de plus de 30 ans et vise toute nouvelle mise en location d'un logement soumis à l'article 6 de la loi de 1989. Sont exclus les renouvellements de baux et les changements de locataires.

 

Le bailleur doit effectuer une déclaration, et reçoit un récépissé. Le récépissé est annexé au bail.

 

3°) Clauses réputées non-écrites

 

L'article 84 de la loi ENL modifie la loi du 6 juillet 1989 en son article 4, en ajoutant aux 10 clauses déjà réputées non écrites dans un contrat de location, 9 nouvelles clauses également réputées non écrites.

 

Il s'agit de toute clause :

 

- qui impose au locataire la facturation de l'état des lieux dès lors que celui-ci n'est pas établi par un huissier de justice dans le cas prévu par l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989,
- qui prévoit le renouvellement du bail par tacite reconduction pour une durée inférieure à celle prévue à l'article 10 (3 ans pour un bailleur personne physique, 6ans pour un bailleur personne morale),
- qui interdit au locataire de rechercher la responsabilité du bailleur ou qui exonère le bailleur de toute responsabilité,
- qui interdit au locataire d'héberger des personnes ne vivant pas habituellement avec lui,
- qui impose au locataire le versement, lors de l'entrée dans les lieux, de sommes d'argent en plus de celles prévues aux articles 5 et 22.
- qui fait supporter au locataire des frais de relance ou d'expédition de la quittance ainsi que les frais de procédure en plus des sommes versées au titre des dépens et de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- qui prévoit que le locataire est automatiquement responsable des dégradations constatées dans le logement,
- qui interdit au locataire de demander au bailleur une indemnité lorsque ce dernier réalise des travaux d'une durée supérieure à quarante jours,
- qui permet au bailleur d'obtenir la résiliation de plein droit du bail au moyen d'une simple ordonnance de référé insusceptible d'appel.

 

Le bailleur devra dorénavant saisir au fond le tribunal d'instance compétent afin d'obtenir un jugement d'expulsion ; celui-ci ne pouvant désormais plus obtenir cette expulsion par la voie du référé en se prévalant d'une clause résolutoire de plein droit, après délivrance d'un commandement de payer.

 

4°) Maintien dans les lieux (loi de 1948)

 

Le droit au maintien dans les lieux a été étendu aux personnes vivant sous le régime du PACS.

 

 

V- Le droit de la copropriété

1°) Mise à jour des règlements de copropriété 

 

La mise à jour des règlements de copropriété qui devait être effectuée avant le 31 décembre 2005 est reportée au 31 décembre 2008.

 

2°) Etat date

 

Les frais de l'état daté son désormais à la seule charge du vendeur.

 

3°) Assouplissement des règles de majorité

 

Pour les décisions relatives à la sécurité de l'immeuble (majorité de l'article 25 : majorité des voix de tous les copropriétaires) et non plus à la majorité des 2/3.

 

4°) Comptabilité des petits syndicats

 

Les syndicats comportant moins de 10 lots dont le budget moyen sur 3 ans consécutifs est inférieur à 15.000 € ne sont pas tenus à une comptabilité établie en partie double.

 

Corinne JEAN
Notaire