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LOI GAYSSOT : L'ACTION DIRECTE DU TRANSPORT ROUTIER 

RESULTANT DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L 132-8
DU CODE DE COMMERCE


Un voiturier qui réalise une opération de transport terrestre peut se trouver en situation financière difficile, si l'expéditeur qui lui a confié cette prestation ne le paie pas, surtout si le montant des factures émises est important.

 

Cette situation pourrait être irrémédiable si le donneur d'ordre de ladite prestation, après avoir connu lui-même de grandes difficultés financières, était déclaré par jugement du Tribunal de Commerce dans le ressort duquel il est immatriculé, en redressement judiciaire, et plus encore, en liquidation judiciaire.

 

Le voiturier n'avait plus que « ses yeux pour pleurer » car sa déclaration de créance entre les mains du Mandataire Judiciaire ne lui donnait que très peu d'espoir d'être compté au rang des créanciers qui seraient réglés.

 

Voici donc une prestation qui était effectuée en pure perte !

 

La Loi GAYSSOT n° 98-69 du 6 Février 1998, aujourd'hui codifiée à l'article L 132.8 du Code de Commerce, a opéré une grande révolution en venant au secours du voiturier créancier malheureux.

 

En effet depuis lors, cet article dispose que « La lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire, ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. »

 

« Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix de transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. »

 

Ce nouveau texte protège dorénavant le voiturier, surtout lorsqu'il est un petit transporteur routier de taille modeste, lui permettant de recouvrer le prix de son transport à l'encontre de toute la chaîne du transport, du commissionnaire au destinataire final, et ce, quand bien même ceux-ci auraient déjà payé les frais de transport.

 

1°) QUELLES SONT LES CONDITIONS D'EXERCICE DE L'ACTION DIRECTE ?

Le voiturier doit s'entendre au professionnel qui effectue personnellement la prestation de transport, peu important d'ailleurs que le consentement à la sous-traitance par le donneur d'ordre n'ait pas été établi (CASS. COM. 18.03.2014 N° 12-29.524).

 

Aussi, le voiturier qui n'est pas réglé de ses prestations de transport peut demander l'application de ces dispositions de l'article L 132-8 du Code de Commerce en saisissant même le Juge des référés. (TC NANTERRE ORD.REF. 29.01.2009 N° 2008R01864)

 

L'action directe du voiturier ne pourra être dirigée que contre l'expéditeur ou le destinataire.

 

La jurisprudence précise que le voiturier n'a nullement à justifier, pour la mise en œuvre de son action directe, d'un constat préalable d'un obstacle définitif au recouvrement de sa créance. (CA PARIS 5ème Chambre Section B 18.12.2003 N° 2003/02575)

 

2°) LA PRESCRIPTION : DANS QUEL DELAI AGIR ?

ATTENTION : en matière de droit du transport, la prescription est très courte. Le voiturier sera bien inspiré de ne pas laisser ses factures s'entasser.

 

Il est de jurisprudence constante que l'action directe en paiement exercée par le voiturier se prescrit par un an tel que le prévoient les dispositions de l'article L 133-6 alinéa 2 du Code de Commerce.

 

Ce délai est donc très court, étant rappelé que cette prescription n'est nullement interrompue par une simple mise en demeure qui est nécessaire, mais insuffisante.

 

Seule une assignation en justice délivrée par un Huissier de Justice dans le délai d'un an de la date d'échéance des factures impayées permettra d'interrompre cette prescription annale et ainsi d'obtenir du Tribunal saisi qu'il déclare recevable les demandes du voiturier, dans le cadre de son action directe.

 

3°) UNE FOIS LE DELAI D'UN AN ECARTE, Y-A-T-IL UNE SOLUTION DE RATTRAPAGE ?

La loi du 6 Février 1988 a rendu applicable aux prestations de transport la loi du 31 Décembre 1975 relative à la sous-traitance qui n'était jusqu'alors applicable qu'aux travaux publics.

 

Ce faisant :

 

- L'expéditeur est assimilé au maître de l'ouvrage,

- Le commissionnaire est assimilé à l'entrepreneur principal,

- Le voiturier est l'exécutant.

 

Aussi, le voiturier qui n'a pas agi dans le délai d'un an de l'échéance de ses factures pourra alors mettre en œuvre son action, par exemple contre l'expéditeur assimilé au maître de l'ouvrage sans que celle-ci soit enfermée dans la très courte prescription annuelle.

 

La prescription quinquennale de droit commun lui sera alors applicable, s'agissant d'un litige de droit commun.


4°) QUELLES SONT LES CONSEQUENCES POUR L'EXPEDITEUR OU LE DESTINATAIRE ACTIONNES PAR LE VOITURIER ?

 

Il est possible que l'expéditeur qui a déjà réglé le prix de transport au commissionnaire se voit réclamer à nouveau le paiement du prix de transport par le voiturier dont la facture n'a pas été honorée par le commissionnaire, quelle qu'en soit la raison. (la Cour de VERSAILLES le rappelle dans un arrêt de la 12ème Chambre Section 1 du 24 Janvier 2002 n° 00/01566)

 

Cependant, l'expéditeur ou le destinataire ayant ainsi payé deux fois la prestation de transport pourra exercer un recours contre le commissionnaire en répétition des sommes qui lui auront été versées.

 

En résumé, il est vivement conseillé au voiturier d'être vigilant sur les factures qu'il émet et de prendre toutes dispositions utiles pour recouvrer par la voie judiciaire les sommes qui lui sont dues par le donneur d'ordre dans le cadre de l'action directe à l'encontre des bénéficiaires de ses prestations.

 

Il serait dommage qu'il se prive de cette efficace protection des dispositions de l'article L 132-8 du Code de Commerce codifiant la Loi GAYSSOT, même si celle-ci l'enferment dans un délai strict.