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Cession et transfert de créances

Sur le plan économique, la cession de créance est une opération par laquelle un créancier transfère à un tiers son titre de créance en lui conférant tout ou partie de ses droits contre le débiteur de la créance cédée.

 

I- Définition et règles générales relatives à la cession de créance :

La cession de créance, parfois appelée transport de créance, est ainsi une convention par laquelle un créancier, le cédant, transmet à une autre personne, le cessionnaire, son droit contre le débiteur cédé.

 

1°) Le principe de la libre cession des créances :

 

A la différence des dettes, les créances sont en principe librement cessibles, à moins qu'il en ait été convenu autrement entre le créancier et le débiteur.

 

D'ailleurs, en application de ce principe, l'article L 442-6 II c du Code de Commerce édicte la règle selon laquelle : « Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, un industriel ou un artisan, la possibilité d'interdire au co-contractant, la cession à un tiers des créances qu'il détient sur lui. »

 

2°) Cette liberté à des limites :

 

Cependant, certaines créances, comme les pensions alimentaires, les pensions civiles ou militaires, par exemple, ne peuvent être cédées.

Il en est en principe de même pour les créances de salaires qui ne peuvent être cédées que pour une quote-part déterminée par le Code du Travail.

 

De même, en matière de sous-traitance, l'entrepreneur principal ne peut céder ou nantir les créances résultant du marché passé avec le maître de l'ouvrage, et correspondant aux travaux effectués par des sous-traitants, sauf à faire préalablement délivrer une caution bancaire destinée à garantir le paiement de ces sous-traitants.

 

Après ces considérations générales, seront abordés les différents modes de transferts de créances (II), avant que d'évoquer quelques cas particuliers de transferts de créances (III).

 

II- Les différents modes de transferts de créances :

 

1°) La cession de droit commun :

 Si la cession de créance de droit commun est fort simple entre les parties, l'opération est plus complexe, en particulier, quant à son opposabilité aux tiers.

 

a) l'absence de formalisme entre les parties :

Selon les dispositions de l'article 1689 du Code Civil : « Dans le transport d'une créance, d'un droit, ou d'une action sur un tiers, la délivrance s'opère entre le cédant et le cessionnaire par la remise d'un titre. »

 

Cela signifie que le cédant doit remettre son titre de créance au cessionnaire.

 

Cette remise s'effectue par « tradition » (remise de la main à la main) s'il s'agit, par exemple, d'une simple reconnaissance de dette.

 

Bien évidemment, seul le propriétaire de la créance ou son représentant habilité, peut valablement céder cette créance.

Sous cette réserve entre les parties, la cession de créance est parfaite entre elles dès qu'elles se sont mises d'accord sur la chose et sur le prix (article 1583 du Code Civil).

 

Cependant, en l'absence de titre, il est fortement recommandé d'établir au moins un acte SSP permettant de prouver la cession et les conditions dans lesquelles elle est intervenue.

 

D'ailleurs, les dispositions de l'article 1341 du Code Civil imposent de passer au moins sous seing privé tout acte portant sur une valeur supérieure à 800,00 Euros (décret du 30 Mai 2001).

 

b) L'opposabilité de la cession aux tiers :

L'opposabilité de la cession aux tiers dépend de formalités qui peuvent apparaître empreintes d'une certaine lourdeur.

 

En effet, afin que la cession de créance puisse produire tous ses effets, il est indispensable de la rendre opposable au débiteur cédé et au tiers.

 

Aussi, en application des dispositions de l'article 1690 du Code Civil, qui organisent cette opposabilité : « Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur. Néanmoins, le cessionnaire peut également être saisi par l'acceptation du transport faite par le débiteur, dans un acte authentique. »

 

Quels sont alors les effets d'une cession de créance non signifiée ou non acceptée ?

 

Comme il vient d'être indiqué ci-dessus, dans les rapports entre le cédant et le cessionnaire de la créance, la cession est réalisée par leur seul accord au sens des dispositions des articles 1134 et 1583 du Code Civil.

 

Aussi, jusqu'à la signification de la cession au débiteur cédé ou jusqu'à son acceptation par acte authentique, la cession de créance n'a d'effets qu'entre les parties à la cession.

 

En conséquence, les tiers à cet acte de cession de créance, notamment le débiteur cédé ou sa caution, ne peut ni se voir opposer cette cession, ni s'en prévaloir. (CASS. CIV. 12.06.1985 BULL. CIV. III n° 95)

 

La conséquence pratique est que cette cession étant inopposable au débiteur et autres tiers, la cession n'emportant aucun effet à leur égard, le débiteur se libère alors valablement s'il paie dans les mains du créancier cédant.

 

Il peut même opposer compensation de sa dette avec sa créance au cédant avant notification de la cession (CASS. COM. 10.03.1987 JCP 87 n° 20.908)

 

Quels sont les effets d'une cession de créance signifiée ou acceptée ?

 

La règle est que le cessionnaire de la créance devient alors créancier du débiteur cédé aux lieu et place du créancier cédant et peut ainsi poursuivre le débiteur.

 

Cependant, le cessionnaire subira également toutes les restrictions à ses droits résultant de la créance cédée.

 

Le débiteur cédé pourra ainsi opposer au nouveau créancier cessionnaire toutes les causes de non paiement ou de réduction de sa dette qu'il aurait pu opposer au cédant :

 

- nullité,
- exception d'inexécution

 

2°) La subrogation :

Selon les dispositions de l'article 1249 du Code Civil qui organisent le paiement par subrogation « La subrogation dans les droits du créancier au profit d'une tierce personne qui le paie est conventionnelle ou légale. »

 

Cela signifie qu'une tierce personne peut prendre l'initiative de régler un créancier aux lieu et place du débiteur.

 

Alors, cette tierce personne deviendra à certaines conditions subrogée dans les droits du premier créancier à l'encontre du débiteur.

 

Cette opération, un peu particulière, est ainsi expressément prévue et organisée par le Code Civil.

 

a) La subrogation légale :

Selon les dispositions de l'article 1251 du Code Civil : « La subrogation a lieu de plein droit :

 

-Au profit de celui qui, étant lui-même créancier, paie un autre créancier qui lui est préférable à raison de ses privilèges ou hypothèques.

-Au profit de l'acquéreur d'un immeuble qui emploie le prix de son acquisition au paiement des créanciers auxquels cet héritage était hypothéqué.

-Au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter.

-Au profit de l'héritier bénéficiaire qui a payé de ses deniers les dettes de la succession. »

 

b) La plus répandue, en particulier dans la vie des affaires, est la subrogation conventionnelle :

Selon les dispositions de l'article 1250 du Code Civil, « cette subrogation conventionnelle s'opère dans deux hypothèses :

 

Lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre ce débiteur : cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement.

 

Lorsque le débiteur emprunte une somme à l'effet de payer sa dette, et de subroger le prêteur dans les droits du créancier. Il faut, pour que cette subrogation soit valable, que l'acte d'emprunt et la quittance soient passés devant Notaires ; que dans l'acte d'emprunt, il soit déclaré que la somme a été empruntée pour faire le paiement, et que dans la quittance il soit déclaré que le paiement a été fait des deniers fournis à cet effet par le nouveau créancier.

 

Cette subrogation s'opère sans le concours de la volonté du créancier. »

 

En bref :

 

La subrogation conventionnelle peut intervenir :

 

- à l'initiative du créancier qui recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans ses droits et actions, contre le débiteur en lui remettant une quittance subrogative,

 
- à l'initiative du débiteur qui dans un acte notarié fait constater son emprunt en vue de payer sa dette à son créancier, et subroge alors son nouveau prêteur dans les droits du premier créancier dorénavant réglé.

Il pourra, par exemple, s'agir du refinancement d'un emprunt à un taux d'intérêt plus avantageux dans le cadre d'une acquisition immobilière.

 

Précisément, sur la subrogation conventionnelle par quittance :

 

Elle n'équivaut à une cession que :

 

- si le paiement est concomitant à la remise de la quittance,
- si le montant payé est égal au nominal de la créance,

 

dans la limite du montant payé (absence de transfert du droit aux intérêts conventionnels).

 

En conclusion, ce recours à la subrogation conventionnelle à l'initiative du créancier est donc limité aux cas suivants :

 

-les créances ne portant pas intérêts,
-les créances dont la valeur est proche du montant nominal.

 

Cette technique est fréquemment utilisée pour les opérations d'affacturage qui permettent par exemple à une entreprise de réaliser de la trésorerie en mobilisant auprès d'organismes bancaires, les factures qu'elles détiennent sur leurs clients.

 

3°) La délégation

Elle est régie par les dispositions de l'article 1275 du Code Civil selon lesquelles : « La délégation, par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier, n'opère point novation si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation. »

 

En bref :

 

Il s'agit d'une opération par laquelle une personne, le délégant, invite une autre personne, le délégué, à payer en son nom une dette à un tiers, le délégataire.

 

La délégation peut être parfaite ou imparfaite.

 

La délégation est parfaite :

 

Au cas où elle éteint la dette du débiteur délégant vis-à-vis du créancier délégataire.

 

Il faut pour cela que le créancier délégataire auquel le débiteur délégant offre un nouveau débiteur en ses lieu et place, ait expressément déclaré qu'il

entendait décharger son débiteur qui a fait délégation.

 

La délégation est imparfaite :

 

-Lorsque le créancier délégataire n'a pas manifesté sa volonté de décharger le débiteur délégant.

-Le créancier délégataire aura ainsi deux débiteurs au lieu d'un.

-La technique de la délégation est fréquemment utilisée pour transférer des loyers ou des créances éventuels liés à des contrats d'assurances décès.

 

4°) La cession cambiaire :

Le transfert de créance peut se réaliser également par le truchement des effets de commerce, tels que billets à ordre, lettres de change et chèques, tels que régis par les dispositions des articles L 511-1 et suivants du Code de Commerce.

 

La lettre de change qui est un instrument de crédit, à l'inverse du chèque qui est un instrument de paiement, est un titre par lequel une personne appelée tireur, donne l'ordre à l'un de ses débiteurs, appelé tiré, par exemple sa banque, de payer une certaine somme à une certaine date à une troisième personne appelée bénéficiaire ou porteur, ou à son ordre.

 

Le billet à ordre est quant à lui un titre par lequel une personne, le souscripteur, s'engage à payer à une époque déterminée une somme d'argent à un bénéficiaire ou à son ordre.

 

Le recours à cette technique de la cession cambiaire est le plus souvent limité aux opérations d'encaissement ou d'escompte d'effets de commerce.

 

5°) La cession DAILLY :

La loi du 2 Janvier 1981 dite « loi DAILLY » et son décret d'application dorénavant codifié aux dispositions des articles L 313-23 et suivants du Code Monétaire et Financier, ont sensiblement simplifié la procédure de cession et de nantissement des créances lorsqu'il s'agit de réaliser ces opérations au profit d'un établissement de crédit qui mobilise les créances de ses clients.

 

La loi avait pour objectif de diminuer la création et la circulation d'effets de commerce.

 

Elle tendait à développer l'utilisation des lettres de change relevées (LCR) à support informatique.

 

Le mécanisme est le suivant :

 

Tout crédit qu'un établissement de crédit consent à une personne morale de droit privé ou de droit public, ou à une personne physique dans l'exercice de son activité professionnelle, peut donner lieu au profit de cet établissement, à la cession ou au nantissement par le bénéficiaire du crédit, de toutes créances que celui-ci peut détenir sur un tiers, personne morale de droit public ou de droit privé, ou une personne physique dans l'exercice de son activité professionnelle.

 

La cession ou le nantissement résulte de la seule remise d'un bordereau appelé « bordereau DAILLY » comportant diverses énonciations obligatoires (article L 313-23 du Code).

 

Le bordereau peut être stipulé à ordre et être alors cessible par simple endossement, comme un effet de commerce.

 

Cependant, le bordereau n'est transmissible qu'à un autre établissement de crédit.

 

Mais, à défaut pour le prétendu cessionnaire, de pouvoir présenter un bordereau de cession revêtu de toutes les mentions exigées, le cessionnaire ne pourra opposer la cession aux tiers et notamment, au débiteur cédé.

 

En bref :

 

  • -La cession doit être liée à un crédit (escompte ou cession en garantie).
    -Le cédant peut être une personne morale de droit public ou privé, ou une personne physique professionnelle.
    -Le cessionnaire est un établissement de crédit.
    -Le débiteur cédé est une personne morale de droit public, ou privé ou un professionnel.
    -Les créances cédées ont un caractère professionnel.
    -Le mode de cession est simplifié par un acte de cession de créance professionnelle.
    -L'opposabilité de cette cession se réalise par la simple remise du bordereau.
    -Les sûretés afférentes à la créance cédée s'effectuent sans formalité additionnelle.

Sauf convention contraire, le cédant reste solidaire du paiement des créances cédées.


Le cessionnaire peut transmettre le bordereau à un autre établissement de crédit.

 

Le cessionnaire peut notifier le débiteur cédé et lui interdire de payer en d'autres mains que les siennes.

 

A défaut, le débiteur cédé se libèrerait valablement entre les mains du cédant.

 

Le débiteur cédé peut accepter la cession.

 

Dans ce cas, il renonce à l'opposabilité des exceptions, ce qui est rare.

 

III - Quelques cas particuliers

1°) Les titres de créances

En principe, le cédant doit remettre son titre de créance au cessionnaire par simple tradition.

 

Mais lorsque la circulation du titre de créance est soumise à des règles particulières, celles-ci doivent être respectées.

 

Il pourra s'agir des titres négociables qui échappent aux formalités de l'article 1690 du Code Civil.

 

Ils sont dits négociables, car leur cession devient opposable au cédé et aux autres tiers sans qu'il soit besoin d'aucune autre formalité, que celles prévues à raison de la forme du titre.

 

Il existe trois formes de titres négociables :

 

le titre au porteur cédé par simple transmission manuelle ou par virement de compte à compte.
le titre à ordre cédé par voie d'endossement.
le titre nominatif cédé par transcription du nom du cédant sur un registre de transfert ou par virement en compte.

 

2°) Les créances futures :

Les créances futures ou éventuelles peuvent faire l'objet de contrat de cession sous la réserve de leur suffisante identification.

 

Ce peut être le cas d'un acheteur de divers immeubles qui, pour financer ses acquisitions, avait souscrit un emprunt auprès d'une banque.

 

L'acte d'achat et de prêt comporte une clause aux termes de laquelle l'emprunteur cède au prêteur par priorité et préférence à tous autres, tous les loyers HT qui pourraient être produits par les immeubles à la garantie du prêt consenti.

 

La Cour de Cassation, en sa première Chambre Civile, par un arrêt du 20 Mars 2001 a dit et jugé que « Dans cette espèce, les créances locatives cédées étaient identifiables dès lors que les preneurs à bail l'étaient. »

 

Il est précisé que la cession ne sera opposable au tiers qu'à compter de sa signification au débiteur cédé.

 

Conclusion :

 

Voici dressé un bref et non exhaustif panorama des principales possibilités légales données, en particulier, aux acteurs de la vie des affaires pour mobiliser leurs créances, leur permettant ainsi, le cas échéant, de reconstituer leur trésorerie.