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L'ENTREPRISE INDIVIDUELLE A RESPONSABILITE LIMITEE
« EIRL »

Nombres d'artisans, commerçants, professionnels libéraux exercent leur activité en nom propre.

 

Cependant, en cas de difficultés financières pouvant les amener à effectuer une déclaration de cessation de paiement, leurs créanciers peuvent les poursuivre sur leur patrimoine professionnel mais également et surtout sur leurs biens personnels, en particulier leur résidence principale.

 

Le risque est ainsi très grand pour l'entrepreneur de perdre en un instant le fruit du travail d'une vie, sa responsabilité patrimoniale n'étant nullement limitée à son patrimoine professionnel, qui est demeurant indissociablement lié à son patrimoine personnel, pour n'en former qu'un seul sur lequel les éventuels créanciers pourront donc se « payer ».

 

Dans un premier temps, afin de palier de tels inconvénients, le législateur par la loi n° 2008 - 776 du 4.08.2008 de Modernisation de l'Economie a institué la déclaration d'insaisissabilité qui permet à toute personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel, ou exerçant une activité professionnelle, agricole ou indépendante, de déclarer insaisissable sa résidence principale et tout bien foncier bâti ou non bâti, non affecté à son usage professionnel.

 

En conséquence, au visa de l'article L 526-1 du Code de Commerce, cette déclaration a d'ores et déjà des effets à l'égard des créanciers :

 

- Pour les dettes professionnelles de l'entrepreneur et non personnelles
- Mais postérieurement à la publicité de la mesure d'insaisissabilité

 

En résumé, les créanciers ne pourront poursuivre leur débiteur sur son patrimoine immobilier même s'il exerce en nom propre, ce qui a constitué déjà une première et importante mesure de protection.

 

Pour plus de précisions sur cette question, nous vous renvoyons à l'article publié sur ce site dans la rubrique «La vie des affaires »

Le législateur a voulu aller plus loin avec ce souci d'apporter une plus importante protection aux professionnels du commerce, des activités libérales et agricoles.

 

1°) Un nouveau statut

La loi du 15 juin 2010 instituant « L'entreprise Individuelle à Responsabilité Limité » (EIRL) a ainsi été publiée au Journal Officiel, le 16 juin suivant et sera applicable à compter du 1er janvier 2011.


Un nouveau statut pour les entrepreneurs individuels a ainsi été créé, celui d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée : EIRL.

L'EIRL, comme auparavant, conservera son statut de personne physique à l'opposé des sociétés qui ont la personnalité morale.

Il agira donc en son nom propre.

 

Cependant, son statut sera beaucoup plus protecteur, car la responsabilité de ce nouvel entrepreneur sera dorénavant limitée.

 

Le formalisme pour changer de statuts sera très allégé.

 

A l'inverse de la création d'une société, aucune rédaction de statuts ni leur dépôt au greffe du Tribunal de Commerce ne sera imposée.

 

Une simple déclaration de son patrimoine professionnel par l'entrepreneur auprès du Centre des Formalités des Entreprises (CFE) sera nécessaire et suffisante.

 

Le but de cette loi est de protéger davantage les entrepreneurs individuels dont le nombre a explosé avec la création des régimes de l'auto-entrepreneur, également explicité sur ce site à la même rubrique.

 

En effet, ces nouveaux entrepreneurs se sont souvent montrés fragiles, l'année 2009 ayant vu ¼ de ceux-ci « déposer le bilan ».

 

Aussi afin de palier d'éventuelles procédures collectives ou de difficultés financières de l'entrepreneur qui devait répondre de ses dettes sur l'ensemble de son patrimoine, le législateur vient d'instaurer ce statut très simplifié qui va réparer l'importante injustice qui existait entre les commerçants exerçant sous forme sociale et les artisans et commerçants en nom propre.

 

D'ailleurs, avant son instauration, outre la déclaration d'insaisissabilité, l'entrepreneur avait déjà la possibilité de séparer, à l'égard des tiers, son patrimoine professionnel de son patrimoine personnel en créant une entreprise personnelle à responsabilité limitée « EURL ».

 

Cependant, le régime juridique de l'EURL qui est proche de celui de la SARL est beaucoup plus complexe et contraignant car :

  • - il nécessite la tenue d'assemblée
    - il exige une véritable gestion comptable et financière,

qui peuvent rebuter le micro entrepreneur.


Le nouveau dispositif législatif permettra ainsi, dans le cadre de l'EIRL de déclarer :

  • - au Registre du Commerce et des Sociétés pour les commerçants,
    - au Répertoire des Métiers pour les artisans,

la liste des biens affectés à l'activité professionnelle et partant d'isoler et de protéger le patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel.

 

2°) En cas procédure collective de l'entrepreneur individuel

Les créanciers ne pourront saisir que le patrimoine affecté à l'activité professionnelle.

 

En seront, par exemple, exclus la maison ou l'appartement de l'entrepreneur individuel ou tout autre bien déclaré lors de la création ou de la transformation en EIRL.

 

Attention :

 

Si l'entrepreneur a des dettes personnelles étrangères à son activité professionnelle, bien évidemment les créanciers poursuivants pourront saisir les biens personnels de celui-ci.

 

A contrario, en cas de dettes personnelles non réglées, le créancier ne pourra étendre ses poursuites au patrimoine de l'entreprise qui sera ainsi protégée.

 

Si le créancier entend contester la sincérité du patrimoine affecté à l'activité et implicitement le patrimoine personnel de l'entrepreneur, il pourra saisir le tribunal compétent de cette contestation.

 

3°) Sur le contenu du patrimoine protégé :

L'insaisissabilité porte sur la résidence principale ainsi que tout bien immobilier bâti ou non, non affecté à un usage professionnel :

  • - résidence secondaire
    - terrain à bâtir, etc.

Si l'immeuble où s'exerce l'activité est à usage mixte (professionnel et habitation) seule la partie affectée à l'habitation doit faire l'objet de la déclaration, sous réserve qu'elle soit désignée dans un état descriptif de division.

 

Se posera alors la question pratique pour les créanciers de savoir comment poursuivre la vente d'un tel bien sur le seul patrimoine professionnel de l'entrepreneur défaillant sans porter atteinte à la partie personnelle du patrimoine de celui-ci.

 

4°) Sur les tiers auxquels sera opposée l'insaisissabilité

L'immeuble ou le bien immobilier sera seulement insaisissable à l'égard des créanciers professionnels de l'entrepreneur et pour les dettes nées

après la publication de la déclaration d'insaisissabilité à la Conservation des Hypothèques.

 

Bien évidemment, seules les créances de l'entreprise seront concernées par cette insaisissabilité et non les créanciers personnels de l'entrepreneur.

 

5°) Sur la fin de l'insaisissabilité

Cette insaisissabilité prend fin lors du décès de l'entrepreneur en cas de renonciation ou lors du partage après divorce si le logement n'est pas attribué à l'entrepreneur.

 

6°) Sur la fiscalité

En matière fiscale, l'entrepreneur individuel en EIRL aura une option à deux branches :

  • - Soit être imposé sur son revenu : IR
    - Soit opter pour la fiscalité des sociétés soumises à l'IS qui est beaucoup plus complexe mais permet de faire des réserves peu imposables dans un but d'autofinancer l'entreprise par exemple.


CONCLUSION :

Il est incontestable que cette loi applicable à partir du 1er janvier 2011 constitue un important progrès afin de protéger les artisans, commerçants et professionnels libéraux à l'égard de leurs créanciers sans les contraindre à recourir à l'exercice sous forme de société dont la constitution et la gestion courante peuvent s'avérer complexes nécessitant des compétences comptables et financières particulières.

 

Gageons que cette importante réforme tendant à protéger un plus grand nombre d'acteurs de notre économie soit un succès, levier de création d'entreprises, d'emplois et de richesses à l'heure où la mondialisation et la crise financière et boursière continuent de peser lourdement sur la croissance française.