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La Loi N° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises

Le nouveau droit des entreprises en difficulté

Introduction

 

«Si le maintien des emplois doit être assuré, les droits des créanciers doivent également être pris en compte dans la mesure où ils restent les moteurs de l'économie et les apporteurs de fonds d'autres entreprises. Sacrifier en toutes circonstances les droits des créanciers, c'est priver d'autres secteurs de l'économie de sources de financement dont elles ont un besoin nécessaire. A l'inverse trop privilégier les intérêts de ces derniers peut conduire à multiplier les suppressions d'emplois.» (Jean-Jacques HYEST, Sénateur).

 

 

Or si la loi de 1985 a favorisé la situation de l'entreprise en difficulté par rapport à celle des créanciers et celle de 1993, en sens inverse, elle a sans doute accru les privilèges des créanciers, en particulier, ceux titulaires de sûretés.

 

La nouvelle loi de sauvegarde des entreprises du 26 Juillet 2005 essaie donc de concilier les intérêts de chacun, ce qui est un exercice difficile.

 

C'est ainsi que le législateur a concédé des cadeaux aux différents protagonistes. Ainsi, en est-il pour les créanciers de l'élargissement des possibilités de remise de dettes par les créanciers publics (et notamment l'Administration Fiscale), la déductibilité de l'assiette de l'impôt sur les bénéfices, des remises de dettes accordées aux débiteurs et la limitation du champ d'action en responsabilité pour soutien abusif.

 

Ainsi en est-il encore des partenaires du débiteur qui voient les nullités de la période suspecte conjurés par l'homologation de l'accord de conciliation.

 

Ainsi en va-t-il enfin pour le débiteur lui-même.

 

Examinons les points essentiels de cette nouvelle loi qui est appliquée depuis le début de cette année.

 

En effet, le décret du 28 Décembre 2005 pris en application de la loi du 26 Juillet précédent sur la sauvegarde des entreprises a été publié au JOURNAL OFFICIEL le 29 Décembre 2005.

 

Par ce décret, cette loi est entrée en application depuis le 2 Janvier 2006 et offre aux entreprises en difficulté la possibilité de bénéficier de nouvelles procédures en plus des classiques redressement et liquidation judiciaires.

 

L'objectif premier de cette loi est donc de permettre un meilleur traitement des difficultés des entreprises par leur prise en charge le plus en amont possible.

 

Les chefs d'entreprises sont ainsi invités à s'adresser à justice dès que les prémices d'une crise apparaissent avant qu'il ne soit trop tard.

 

Les chefs d'entreprises sont ainsi invités à s'adresser à justice dès que les prémices d'une crise apparaissent avant qu'il ne soit trop tard.

 

En bref, les grandes nouveautés de cette loi sont les suivantes :

Le Champ d'application des procédures de traitement des difficultés des entreprises est élargi à toutes les entreprises, puisque les professionnels indépendants peuvent en bénéficier.

 

La cessation des paiements cesse d'être la ligne de partage entre les procédures de traitement amiable des difficultés des entreprises et les procédures collectives, puisque la procédure de conciliation qui se substitue à l'ancien règlement amiable, peut être ouverte si le débiteur est en cessation des paiements depuis moins de 45 jours, comme il sera précisé ci-après.

 

Une nouvelle procédure collective est créée, la procédure de sauvegarde.

 

Peuvent en bénéficier les débiteurs qui ne sont pas encore en cessation des paiements, mais qui justifient de difficultés qu'ils ne sont pas en mesure de surmonter, de nature à conduire à la cessation des paiements.

 

La procédure de redressement judiciaire n'est que très peu concernée par la réforme et est maintenue.

 

Une procédure de liquidation judiciaire simplifiée est créée pour les entreprises ne dépassant un certain seuil.

 

Le plan de cession devient une opération de liquidation judiciaire.

 

La réforme institue un privilège au profit de ceux qui apportent de l'argent frais "new monay" dans le cadre de la procédure de conciliation.

 

Pour les entreprises d'une certaine importance, la loi créée les Comités de créanciers.

 

Deux comités sont constitués à l'initiative de l'Administrateur :

 

  • un Comité réunissant les établissements de crédit,
  • un Comité des principaux fournisseurs de biens ou de services.

Seront ici abordés les principales nouveautés de cette loi :

 

  • Le mandat ad hoc,
    La conciliation,
    La sauvegarde.

I - Une innovation : l'extention des procédures de préventions et de traitement des difficulté des entreprises aux professions indépendantes

Avant la loi du 26 Juillet 2005, dont le décret d'application a été pris le 28 Décembre suivant, les procédures de préventions, de règlements amiables, ainsi que celles de redressements et de liquidations judiciaires étaient réservées aux commerçants, artisans et aux personnes morales de droit privé.

 

La loi nouvelle rend désormais les procédures qu'elle institue, également applicables aux personnes physiques exerçant une activité professionnelle indépendante, dont une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.


 

II - La confirmation de la procédure de mandat ad hoc:

 

Rappel : L'article L 611-3 du Nouveau Code de Commerce issu de la loi du 1er Mars 1984 relatif à la procédure de règlement amiable prévoit la possibilité pour le Président du Tribunal de Commerce de désigner un mandataire ad hoc.

 

La loi du 26 Juillet 2005 consacre en l'article L 611-3 du Code, en sa nouvelle rédaction, le mandant ad hoc en ces termes : " le Président du Tribunal de Commerce ou du Tribunal de Grande Instance peut, à la demande du Représentant de l'entreprise, désigner un mandataire ad hoc, dont il détermine la mission. "

 

Ce texte continue de laisser une grande latitude au Juge qui le désigne tant en ce qui concerne la teneur que la durée de la mission du mandataire ad hoc.

 

Rappel : Cette désignation qui peut permettre, par exemple, au chef d'entreprise par l'intermédiaire de son mandataire ad hoc, de tenter un rapprochement avec les créanciers de l'entreprise quant au paiement des dettes de cette dernière, ne peut cependant, avoir d'influence sur la situation de ladite entreprise.

 

En effet, le débiteur reste à la tête de ses affaires. Quant aux tiers, leurs droits ne peuvent être restreints par ce mandant ad hoc.

 

D'ailleurs, aucune mesure de publicité n'est prévue quant à la nomination de ce mandataire ad hoc.

 

III- Une importante innovation : la concicliation ouverte aux entreprises en cessation des paiements

RAPPEL : L'article L 611-3 du Code de Commerce précité, tel que résultant de la loi du 1er Mars 1984, avait institué la procédure de règlement amiable.

 

Elle était ouverte aux entreprises commerciales et artisanales et à toutes personnes morales de droit privé, qui sans être en état de cessation des paiements, éprouvaient une difficulté juridique, économique ou financière ou des besoins ne pouvant être couverts par un financement adapté aux possibilités de l'entreprise.

 

Dans cette ancienne procédure, la saisine du Président du Tribunal de Commerce par le représentant de l'entreprise, ne devait être ni trop précoce, ni tardive.

 

En effet, cette procédure était réservée aux entreprises in bonis qui n'étaient pas en état de cessation des paiements (ancien article L 611-4 alinéa 1er du Code de Commerce), c'est-à-dire qui n'étaient pas dans l'impossibilité de faire face à leur passif exigible avec leur actif disponible.

 

Dans l'affirmative, seule la voie classique des procédures de redressement ou de liquidation judiciaires était admise.

 

Enfin, en cas d'ouverture de la procédure de règlement amiable, la mission du conciliateur désigné par le Président du Tribunal, était de favoriser le fonctionnement de l'entreprise et de rechercher la conclusion d'un accord avec les créanciers (ancien article L 611-3 alinéa 4 du Code de Commerce).

 

Aujourd'hui :

L'article L 611-4 du Nouveau Code de Commerce, en sa rédaction, issue de la loi du 26 Juillet 2005, dispose que : " il est institué devant le Tribunal de Commerce une procédure de conciliation dont peuvent bénéficier les personnes exerçant une activité commerciale ou qui éprouvent une difficulté juridique, économique ou financière avérée ou prévisible, et ne se trouvant pas en cessation des paiements depuis plus de 45 jours. "

 

Le conciliateur est désigné par le Président du Tribunal de Commerce ou de Grande Instance pour une période renouvelée, qui ne peut excéder cinq mois, sur requête motivée de la personne morale ou de la personne physique concernée.

 

La mission de conciliation est ici de favoriser la mise en place des mesures propres à mettre fin aux difficultés rencontrées, et s'il y a lieu, à l'état de cessation des paiements.

 

La possibilité pour l'entreprise en difficulté de bénéficier d'une procédure confidentielle est une innovation majeure de la loi, qui instaure cette procédure qui se situe à mi-chemin entre :

 

  • la classique procédure de règlement amiable interdite à une entreprise en état de cessation des paiements,
    et le redressement ou la liquidation judiciaire destinée aux entreprises en état de cessation des paiements.

En résumé, sous réserve des leçons de la pratique, une entreprise en état de cessation des paiements récente pourra se mettre sous le régime de la protection de la conciliation, mesure confidentielle, si elle est économiquement saine, mais rencontre des difficultés de trésorerie, éventuellement caractérisées par un état de cessation des paiements.

 

Elle pourra ainsi " rebondir " en évitant le traumatisme résultant d'une procédure collective classique et de son environnement judiciaire, tant pour les créanciers, que pour elle-même.

 

IV- Le constat et l'homologation de l'accord de conciliation

 

1°) Le constat de l'accord

 

L'accord amiable conclu entre l'entreprise débitrice et ses principaux créanciers dans le cadre d'une conciliation destinée à mettre fin aux difficultés de l'entreprise est constaté par le Président du Tribunal dans une décision :

  • - non soumise à publication,
    - insusceptible de recours,
    - qui met fin à la procédure (article L 611-8 I du Nouveau Code de Commerce).

Aussi, le Juge peut donner force exécutoire à un acte transactionnel, comme cette possibilité est classiquement donnée au Président du Tribunal de Grande Instance en application des dispositions de l'article 1441-4 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

 

2°) Une importante nouveauté : l'homologation de l'accord :

 

Allant plus loin, le législateur au paragraphe II de l'article L 611-8 du Nouveau Code de Commerce, innove en permettant au Tribunal, à la demande du débiteur, d'homologuer l'accord obtenu si :

 

  • - cet accord met fin à l'éventuel état de cessation des paiements de l'entreprise,
  • - ses termes sont de nature à assurer la pérennité de l'activité de celle-ci,
  • - il ne porte pas atteinte aux intérêts des créanciers non signataires.

Cette homologation se distingue du constat de l'accord en ce qu'elle est consécutive à une analyse dudit accord de conciliation, après que l'ensemble des parties :

 

  • - le débiteur,
    - les créanciers concernés,
    - les représentants des salariés,
    - le conciliateur,
    - le ministère public,
    - tout tiers informé,

aient été entendus.

 

De plus, le jugement d'homologation fait l'objet d'une mesure de publicité et est susceptible de tierce opposition (recours des tiers à l'accord).

 

 

3°) Intérêt de l'homologation de l'accord pour les créanciers, parties à celui-ci :

Le jugement d'homologation confère un privilège aux personnes parties à l'accord homologué, et qui ont :

 

  • - consenti un apport de trésorerie (par exemple : le banquier),
    - ou un service au débiteur,
    - en vue d'assurer la poursuite de l'activité de l'entreprise et sa pérennité.

Aussi, au cas où la procédure de conciliation aurait échoué et donnerait lieu de manière subséquente à une procédure de :

 

  • - sauvegarde sur laquelle il sera revenu ci-après,
    - redressement judiciaire,
    - liquidation judiciaire,

les personnes concernées et bénéficiant du privilège dont s'agit, sont alors payées de leur concours avant toutes créances nées antérieurement à l'ouverture de la conciliation.

 

En résumé, cette homologation de l'accord de conciliation constitue une innovation majeure de la loi nouvelle par la sécurité juridique qu'elle confrère aux partenaires de l'entreprise qui contribuent au maintien de son activité et à sa pérennité.

 

 

4°) La procédure de sauvegarde :

Cette procédure bénéficie à toute entreprise qui rencontre des difficultés qu'elle n'est pas en mesure de surmonter, de nature à la conduire à la cessation des paiements.

 

Son ouverture, par jugement, emporte de plein droit l'interdiction de payer les créances nées à cette date et interrompt ou interdit toute action en justice des créanciers.

 

Si le Tribunal constate que l'entreprise n'est pas en état de cessation des paiements, ce qui entraînerait dans le cas contraire la conversion de la procédure en redressement ou liquidation judiciaire, celui-ci arrête un plan de sauvegarde qui peut comporter l'arrêt d'une ou plusieurs activités.

 

Cette procédure semble séduisante en ce qu'elle traduit une bonne anticipation des difficultés par les dirigeants et que sa finalité est de sauvegarder l'entreprise et la personne morale, s'il s'agit d'une Société.

 

Cependant, les récents commentateurs de cette loi émettent de sérieuses réserves sur :

 

  • - ses nombreuses ressemblances avec le redressement judiciaire actuel et futur,
    - la tardiveté avec laquelle les chefs d'entreprises acceptent d'envisager une procédure judiciaire pour traiter leurs difficultés.

5°) Les remises de dettes :

Les créanciers privés pouvaient accorder jusqu'alors des remises totales ou partielles de dettes aux débiteurs sans que l'autorité judiciaire ne puisse les leur imposer dans les procédures amiables et judiciaires.

 

La loi nouvelle innove en prévoyant que les créances sociales et fiscales, à l'exception des impôts indirects (par exemple : la TVA) pourront également faire l'objet de remises totales ou partielles.

 

C'est ce que prévoit l'article L 626-6 du Nouveau Code de Commerce en ces termes :

 

"les Administrations Financières, les Organismes de Sécurité Sociale, les Institutions gérant le régime d'assurance chômage prévu par les articles L 351-3 et suivants du Code du Travail et les Institutions régies par le livre IX du Code de la Sécurité Sociale peuvent accepter, concomitamment à l'effort consenti par d'autres créanciers, de remettre tout ou partie de ses dettes au débiteur dans des conditions similaires à celles que lui octroierait, dans des conditions normales de marché, un opérateur économique privé placé dans la même situation."

 

"Dans ce cadre, les Administrations Financières peuvent remettre l'ensemble des impôts directs perçus au profit de l'Etat et des Collectivités Territoriales, ainsi que des produits divers du budget de l'Etat dus par le débiteur. S'agissant des impôts indirects perçus au profit de l'Etat et des Collectivités Territoriales, seuls les intérêts de retard, majorations, pénalités ou amendes peuvent faire l'objet d'une remise."

6°) Les comités de créanciers :

Les créanciers d'une entreprise bénéficiant d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire doivent, ou peuvent sur autorisation du Juge Commissaire (selon leur importance en fonction des critères fixés par décret) être réunis en deux comités par l'Administrateur Judiciaire :

 

  • -le comité des établissements de crédits,
    -le comité des principaux fournisseurs de biens ou de services.

Le débiteur présente à ces comités des propositions en vue d'élaborer le projet de plan de sauvegarde ou de redressement.

 

Si ces comités adoptent le projet de plan, qui n'est soumis ni à la durée maximale de dix ans, ni aux contraintes de délais et d'annuités minimales éditées par l'article L 626-18 du Nouveau Code de Commerce, le Tribunal arrête le plan après s'être assuré de la protection suffisante des intérêts de tous les créanciers.

 

Si l'un des comités refuse les propositions qui lui sont faites ou ne se prononce pas, ou encore si le Tribunal n'arrête pas le plan proposé avec l'accord des comités, la procédure est reprise pour préparer un plan dans les conditions " de droit commun " peu modifiées par la loi nouvelle.

 

En résumé, l'institution des comités de créanciers apparaît ainsi comme un mode de consultation alternatif des créanciers, laissant une souplesse totale aux parties en présence sur les termes de leurs accords, sous le contrôle du Tribunal.

 

Ainsi, le législateur de 2005 consacre et généralise une pratique qui était de plus en plus courante dans les procédures amiables et judiciaires, mais ne concernant généralement que des entreprises d'une certaine importance.

 

Conclusion

Cette réforme de grande ampleur qui commence à être appliquée par les Tribunaux de Commerce depuis le 2 Janvier 2006 et l'ensemble de leurs acteurs, Magistrats, Mandataires de Justice, et Avocats, engendrera de nouveaux contentieux.

 

Il est à espérer qu'en définitive, le droit des créanciers sera aussi protégé que celui des entreprises en difficulté dont le traitement plus en amont sera dans la pratique aussi protégé que celui des entreprises en difficulté, dont le traitement plus en amont peut être regardé comme une chance supplémentaire de redressement tant pour elle-même, que pour ses partenaires, en particulier, créanciers.

 

La pratique le dira !

 

Tableau de synthèse de l'ensemble des procédures :


Extrait du site de l'Association Syndicale Professionnelle des Administrateurs Judiciaires " ASPAJ " : rubrique actualité (www.ajinfo.org.)

 

Télécharger le Tableau de Synthèse de l'Ensemble des Procédures