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Le contrat d'affacturage

 

A. Une définition

 

Selon l'arrêté du 29 novembre 1973 relatif à la terminologie économique et financière l'affacturage est :

 

" Une opération ou technique de gestion financière par laquelle, dans le cadre d'une convention, un organisme spécialisé gère les comptes clients d'entreprises en acquérant leurs créances, en assurant leur recouvrement pour son propre compte et en supportant les pertes éventuelles sur des débiteurs insolvables. »

 

Sur le plan économique et pratique il s'agit pour une entreprise commerciale dénommée l'adhérente de transmettre, dans le cadre d'un contrat commercial, ses créances à une société de financement dénommée « le factor » laquelle, moyennant une rémunération, se charge d'en assurer la gestion, de les recouvrer et d'en garantir le paiement même en cas de défaillance du débiteur.Il s'agit donc fondamentalement d'un contrat de louage d'ouvrage à durée indéterminée, qui peut être qualifié d'intuitu personae en raison de la collaboration étroite et confiante qui doit nécessairement s'instaurer entre les parties pour sa bonne exécution. Cependant ces dernières vont être conduites à mettre en œuvre, dans leurs rapports réciproques, d'autres techniques juridiques, principalement la subrogation conventionnelle et la convention de compte-courant et ce, pour des raisons pratiques et afin d'assurer la parfaite exécution de leurs obligations contactuelles réciproques.

 

B. Quels sont les intervenants?

 

1. Le factor : c'est le prestataire de services. Il doit remplir certaines conditions permettant d'assurer à ses clients un maximum de garanties :

 

  • -il doit avoir obligatoirement le statut d'établissement de crédit
    -il doit avoir obtenu l'agrément du CECEI (Art. 15 L. 24.1.1984)
    -enfin il est soumis au contrôle de la commission bancaire (Art. 37 L. 24.1.1984)

2. L'adhérent ou client : c'est le bénéficiaire des prestations offertes par le factor. Il s'agira généralement d'entreprises d'une certaine dimension, désireuses de se décharger de la gestion de leurs créances et d'obtenir, en contrepartie de leur transfert au factor, un financement et une garantie de bonne fin.

 

3. Les débiteurs : du fait de la remise des factures qui lui sont confiées par son adhérent, le factor va être directement en rapport avec les débiteurs de son adhérent et traitera avec eux, soit pour son propre compte, s'il bénéficie de la subrogation (cas des créances garanties) soit pour le compte de son adhérent (cas des créances non garanties

 

C. Objet du contrat

 

L'objet du contrat est constitué d'un ensemble de prestations de services fourni par le factor à l'adhérent, en contrepartie d'une rémunération.

 

 

1°) Nature et contenu des prestations du factor :

 

Ces prestations de services concernent :

 

  • - la gestion des créances que l'adhérent cède au factor
  • - leur garantie de bonne fin pour celles qu'il a approuvées
  • - et enfin leur financement

a) La gestion des créances :

 

L'adhérent doit remettre au factor les pièces justificatives de toutes ses créances certaines et exigibles, accompagnées d'un bordereau et d'une promesse écrite de subrogation (quittance subrogative) conforme à l'article 1250 du code civil.

 

Deux précisions doivent être données à ce propos : En premier lieu, l'équilibre économique des prestations complexes et risquées dont le factor a la charge suppose que l'adhérent cède en exclusivité et en totalité les créances de ses clients : Ce sont les principes d'unicité et de globalité qui interdisent normalement à l'adhérent de confier ses créances à un autre prestataire et de procéder à toute sélection de ses créances avant leur transfert au factor, sauf accord exprès des parties prévoyant d'exclure de ce transfert une catégorie de débiteur ou de créance relative à un produit ou à un secteur d'activité déterminé En second lieu, l'adhérent ne peut transmettre au factor que des créances certaines et exigibles, ce que ce dernier doit pouvoir vérifier en se faisant remettre les pièces justificatives de chaque créance et en obtenant auprès de son « partenaire adhérent » toutes les informations nécessaires.

 

b) La garantie des créances :

Le contrat d'affacturage prévoit -- et c'est son principal intérêt, -- la garantie de bonne fin des créances c'est-à-dire leur paiement en cas d'insolvabilité constatée du débiteur.

 

Cette garantie ne concerne que les créances ayant fait l'objet d'un agrément (ou approbation) préalable du factor, selon une procédure définie par le contrat et pour lesquelles l'adhérent l'a valablement subrogé dans ses droits et actions contre le débiteur.

 

En pratique l'adhérent, en même temps qu'il remet ses créances au factor, sollicite pour chacun de ses débiteurs son approbation pour un montant déterminé. Après étude des pièces et des informations recueillies sur les débiteurs, le factor fixe pour chacun de ceux-ci, le cas échéant, le montant de sa garantie et s'engage donc à régler à due concurrence les factures impayées ou irrecouvrables.

 

Un compte courant est ouvert dans les livres du factor au nom de l'adhérent afin de retracer les différentes opérations créditrices et débitrices résultant de leurs relations juridiques et comptables.

 

Si les créances ont été approuvées par le factor, son approbation et son acceptation de la subrogation dans les droits de son adhérent résultera du seul fait de l'inscription de ces créances au crédit du compte. Celui-ci fera apparaître l'encours des montants garantis, lequel sera renouvelé au fur et à mesure de son utilisation à l'instar d'un crédit bancaire de type révolving.

 

Dans le cas contraire de non approbation des créances, le factor n'assure le recouvrement de celles-ci qu'en qualité de mandatairede son adhérent.

 

c) Le financement des créances :

Les contrats d'affacturage stipulent généralement que le factor s'engage à financer les créances, c'est-à-dire à mettre à la disposition de son adhérent, les fonds correspondant au montant des créances garanties, en attendant les règlements à venir des débiteurs.Si le contrat le prévoit expressément, ce financement peut également porter sur une partie des créances non approuvées.

 

Afin de garantir le règlement des sommes dont l'adhérent resterait redevable à l'égard du factor, le contrat stipule généralement au profit de ce dernier le versement d'une retenue de garantie dont le montant est déterminé en fonction de l'encours des créances. Cette retenue de garantie se compensera automatiquement et à due concurrenceavec les sommes dont le factor devra la restitution à son adhérent après encaissement des créances recouvrées et clôture du compte


2°) La rémunération du factor :

Cette rémunération comporte généralement deux éléments :

 

  • - la commission d'affacturage calculée par application d'un pourcentage sur le montant des créances transmises et des frais accessoires. Cette commission est destinée à couvrir les honoraires dus au factor pour l'ensemble des services rendus à son adhérent (gestion et recouvrement des créances).
  • - et une commission de financement destinée à rémunérer l'avance de trésorerie résultant de la mise à disposition par le factor du montant des créances non encore encaissées des débiteurs. Cette commission est calculée par référence à un taux de base bancaire ou au taux du marché monétaire, sans pouvoir bien entendu dépasser la limite fixée par la loi sur l'usure.

 

D) Droits et obligations des parties

1°) Droits et obligations du factor :

Les droits et obligations du factor sont définis par le contrat.

 

Ils résultent des engagements réciproques qui le lient à son adhérent. Il convient donc de se reporter aux termes du contrat et aux textes légaux relatifs aux outils juridiques mis en œuvre.Notons simplement que, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, le factor n'a aucune obligation d'information sur l'état financier de son client ou sur ses relations avec ses fournisseurs (Cass. com. 27 06 1989. JCPE 1990 II 15668). Il ne semble donc pas que sa responsabilité puisse être engagée pour soutien artificiel ou fautif d'activités déficitaires de ses adhérents.De même le droit pour le factor de donner ou de refuser son agrément ou de le retirer d'une manière discrétionnaire ne permet pas, sauf circonstances particulières, d'engager sa responsabilité dès lors qu'aucune faute caractérisée ayant causé directement un préjudice à son adhérent ne peut lui être reprochée.

 

Plus généralement et conformément aux règles régissant les contrats synallagmatiques, les obligations du factor cessent dès que son adhérent ne remplit pas les siennes ou se montre incapable de valider les droits qu'il lui a transférés. Dans ce cas cette impossibilité de transfert conduira le factor à l'annuler par une simple contre passation d'écriture.


2°) Droits et obligations de l'adhérent :

L'adhérent doit, de même, exécuter de bonne foi les obligations mises à sa charge par le contrat concernant notamment :


  • - le paiement de la rémunération convenue,
  • - la remise au factor de la totalité des créances certaines et exigibles dans les conditions prévues par le contrat, étant précisé que toute faute de sa part (faux en écritures, manoeuvres frauduleuses etc.) est susceptible d'engager sa responsabilité pénale,
  • - la remise de toutes les pièces justificatives établissant l'existence et le montant de ses créances (factures, bons de commande, bons de livraison, effets de commerce etc.).

 

Ici doit être notée spécialement l'obligation pour l'adhérent de transmettre au débiteur préalablement à la remise de ses pièces justificatives au factor, l'original des factures correctement établies comportant la clause de payement avec subrogation afin qu'il en soit informé et que cette subrogation lui soit opposable.

 

Par ailleurs, la nécessaire coopération des parties pour la mise en oeuvre efficace de leur partenariat, et le maintien de bonnes relations avec les débiteurs qui sont aussi des clients, exige une application très stricte de leurs devoirs réciproques d'information, de loyauté et d'assistance dont les modalités d'exécution sont précisées par les clauses du contrat.Tout manquement à ces obligations sera évidemment pris en compte, en cas de litige, pour l'appréciation de leur responsabilité contractuelle.


3°) Droits et obligations du débiteur :

Le débiteur n'étant pas partie au contrat, les dispositions de celui-ci ne peuvent lui être opposables en application de l'article 1165 du code civil.Mais il en

va autrement des droits et obligations du factor nés de la subrogation conventionnelle, laquelle a un effet « erga omnes » (Cas. com. 3 avril 1990. D. 1991. J. p. 180).

 

 

Trois exemples :


  • - Le paiement du débiteur qui a été informé de la subrogation n'est libératoire que s'il est effectué entre les mains du factor.
  • - De même, les réclamations du débiteur qui a connaissance de la subrogation ne sont recevables que si elles sont portées à la connaissance du factor. (Paris 14e ch. Sect B. 17 mars 1989 -- Juris-data n° 02 108).
  • - Dans ses rapports avec le factor subrogé, le débiteur pourra se prévaloir de l'exception de compensation à condition que sa créance soit connexe avec sa dette et qu'elle soit née antérieurement à la subrogation.
  •  

D'une manière générale, il pourra invoquer à l'encontre du factor toutes les exceptions de fait ou de droit qu'il aurait pu opposer à son créancier initial, sauf application des règles du droit cambiaire.


Conclusion :

Le présent article n'avait d'autre ambition que de donner un aperçu des aspects principaux de cette technique de gestion financière complexe qui pose souvent des questions difficiles, à la mesure de cette complexité. En se reportant à l'étude extrêmement complète de Monsieur J.P Deschanel (V. Jurisclasseur Fasc 580 et la bibliographie), on verra qu'en réalité il s'agit d'un instrument très pratique rendu finalement très simple grâce à l'utilisation de la subrogation conventionnelle comme support juridique. Ne doutons pas que l'affacturage, par les garanties qu'il offre et par l'efficacité de l'aide économique et juridique qu'il peut apporter aux entreprises, ne cessera encore de se développer et de participer pour une très large part à l'essor des échanges commerciaux.

 

Louis GACOIN

Avocat Honoraire