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Le Recouvrement de Créances

 

Les impayés constituent l'une des premières causes de vulnérabilité des entreprises.

 

Il existe cependant divers moyens pour recouvrer des créances.

 

Afin d'utiliser la voie la plus adéquate et rapide pour y procéder, il convient d'analyser et de connaître le statut juridique du débiteur, son patrimoine et le montant de la créance à recouvrer.

 

Les moyens utilisés en dépendront ; l'objectif premier du créancier étant d'obtenir un recouvrement rapide et au moindre coût.

 

I - Quelles sont les différentes mesures de recouvrement ?

 

1°) Le recouvrement amiable

Ce recouvrement qui consiste en une intervention du créancier ou de son Conseil en amont, a pour objet d'obtenir dans le cadre d'une négociation, que le débiteur rembourse spontanément sa dette.

 

Une mise en demeure sous la forme d'une lettre recommandée avec accusé de réception d'Avocat, conforme aux règles déontologiques de notre Ordre, constitue une première démarche permettant, le cas échéant avant toute action judiciaire, d'obtenir à un moindre coût le paiement de la créance impayée.

 

C'est donc dans le cas où les diverses tentatives amiables ont échoué, le débiteur se montrant réticent à payer, que sont alors envisagées d'autres voies de contentieux, telles que :

  • - les mesures conservatoires,
    - l'action en justice,
    - le recouvrement forcé.

Il faut réserver le cas où le débiteur, pour refuser d'honorer sa dette, oppose à son créancier, des contestations, sur par exemple la qualité des prestations fournies et leurs délais d'exécution.

 

Il convient alors d'apporter au débiteur toutes réponses utiles sur celles-ci, ou d'envisager une transaction aux termes de laquelle le créancier renoncera à titre forfaitaire à une partie de sa créance, " un tien valant mieux que deux, tu l'auras... "

 

Enfin, le créancier a le plus grand intérêt à mettre rapidement son débiteur en demeure, car en application de l'article 1153 du Code Civil, les intérêts légaux courent à compter de la mise en demeure.

 

2°) La mesure conservatoire

Lorsque le créancier a les plus grands doutes sur la solvabilité de son débiteur, la loi le protège pendant cette période transitoire et lui offre la possibilité d'utiliser des mesures conservatoires de sa créance jusqu'à son recouvrement.

 

Alors, s'il peut démontrer que celle-ci est au moins fondée en son principe, sans être forcément certaine, liquide ni exigible, mais qu'elle est cependant menacée dans son recouvrement, le créancier aura la faculté de demander en justice l'autorisation de prendre, à titre conservatoire, une sûreté sur les facultés mobilières ou immobilières du débiteur ou de procéder à une saisie conservatoire sur un bien appartenant à celui-ci.

 

Cette mesure conservatoire a pour effet de conférer à la créance en recouvrement un caractère privilégié, son titulaire pouvant ultimement être réglé en priorité s'il obtient par la suite une décision de justice favorable constituant un titre.

 

Cette mesure conservatoire a par ailleurs pour effet en amont, de parer à toute organisation d'insolvabilité du débiteur.

 

3°) L'action en justice

Si les tentatives de recouvrement amiables se sont révélées vaines, il reste au créancier à saisir le Tribunal compétent pour obtenir un jugement contre son débiteur avant que de confier à un Huissier la charge de procéder à son exécution.

 

Le rôle de l'Avocat est ici primordial.

 

Sa connaissance des règles de procédure et de compétence, son expérience en la matière, lui permettront de donner à son client les conseils indispensables sur la procédure adéquate avant que d'agir en général par voie d'assignation.

 

La rédaction de cette assignation est d'importance, car d'une part, elle circonscrit le litige porté à l'appréciation du Tribunal saisi, qui doit rapidement et pleinement être éclairé sur celui-ci.

 

D'autre part, la charge de la preuve de sa créance repose sur le créancier, qui devra verser aux débats les pièces contractuelles, les bons de livraison, les factures, un relevé de compte et justifier les tentatives amiables pour recouvrer celle-ci.

 

Le créancier devra, le cas échéant, envisager de pouvoir répondre aux divers moyens soulevés par le débiteur tant en droit, qu'en fait pour contester sa dette.

 

Le rôle de l'Avocat sera ici également déterminant.

 

Les créanciers disposent ainsi de plusieurs actions en justice :

La procédure d'injonction de payer :

Elle donne lieu à un titre non contradictoire.

 

Cette procédure, permet ainsi, aux créanciers d'obtenir une décision judiciaire sans avoir dû préalablement appeler le débiteur et sans qu'aucune des parties ait eu à comparaître.

 

Elle peut être utilisée tant pour le recouvrement des créances civiles, que commerciales (article 1405 et suivants du Nouveau Code de Procédure Civile).

 

Un inconvénient majeur :

Le débiteur peut former opposition à l'ordonnance. La procédure sera alors intégralement reprise depuis son origine en présence des deux parties, ce qui engendrera une importante perte de temps au détriment du créancier poursuivant.

 

L'assignation en paiement est une voie beaucoup plus certaine.

 

L'assignation en paiement :

Rédigée avec soin par l'Avocat du créancier, elle est l'acte contentieux le plus courant et délivrée par voie d'Huissier permettant ainsi au créancier poursuivant de faire citer son débiteur à comparaître devant le Tribunal.

 

Le référé-provision :

La procédure de référé provision peut être utilisée devant les juridictions civiles, mais également commerciales.

 

Par cette procédure, le Juge des référés a la faculté d'accorder au créancier une provision qui peut représenter 100 % de la créance impayée.

 

La condition essentielle de la saisine du Juge des référés, est que la créance ne soit pas sérieusement contestable.

 

En effet, le Juge des référés est celui de l'évidence qui n'apprécie nullement la validité du contrat sur lequel repose la créance à recouvrer.

 

Dès lors que l'obligation contractuelle qui lui est soumise est incomplète, ambiguë ou susceptible d'interprétation, le Juge des référés se déclarera incompétent en invitant le créancier poursuivant à " frapper à la bonne porte ", c'est-à-dire à saisir le Tribunal statuant au fond.

 

Le rôle de l'Avocat est ici également primordial, car il pourra conseiller utilement son client créancier en fonction des pièces du dossier, de saisir tantôt le Juge du fond, tantôt le Juge des référés.

 

Dans cette dernière hypothèse, par exemple le créancier peut verser aux débats :

 

  • - une reconnaissance de dette de son débiteur demandant des délais de paiement,
    - un chèque ou une lettre de change acceptée, impayés.

Au surplus, l'intérêt d'une procédure de référé, si les conditions en sont remplies, est pour le créancier d'obtenir une ordonnance de référé revêtue de l'exécution provisoire de plein droit. Cela signifie que l'appel de cette ordonnance devant la Cour d'Appel par le débiteur, ne peut en suspendre l'exécution.

 

4°) Le recouvrement forcé

L'Huissier de Justice, qui est le partenaire habituel et avisé de l'Avocat du créancier, joue un rôle important à ce stade du dossier.

 

Si une fois la décision de justice rendue (au fond ou en référé), et après qu'elle ait été régulièrement notifiée au débiteur par l'Huissier instrumentaire, celui-ci ne s'exécute pas, commence alors en aval de l'affaire, la procédure de recouvrement forcé.

 

L'Huissier poursuivant, en fonction de la situation patrimoniale du débiteur, pourra saisir un ou plusieurs biens de celui-ci, des meubles, des comptes bancaires, ou même des biens immobiliers (cas de la procédure lourde et longue de la saisie immobilière qui nécessite par ailleurs l'intervention d'un Avocat spécialisé en la matière).

 

Bien évidemment, afin d'éviter la saisie de ses biens, le débiteur aura toujours la faculté de régler sa dette en cours d'exécution.

 

Il pourra par ailleurs saisir le Juge de l'Exécution compétent s'il entend contester la validité de la saisie pratiquée ou demander au Juge des délais de paiement.

 

Là encore, la compétence de l'Avocat et de l'Huissier du créancier poursuivant sont d'importance, afin de déjouer les éventuelles manœuvres dilatoires du débiteur qui tenterait d'utiliser une erreur de procédure pour échapper à ses obligations.

 

D'ailleurs, les règles rigoureuses relatives aux mesures d'exécutions sont régies par la loi n° 91-650 du 9 Juillet 1991 et son décret d'application n° 92-755 du 31 Juillet 1992.

 

II- Quelles sont les conditions pour qu'une créance soit recouvrable ?

 

1°) La créance doit présenter trois caractéristiques : être certaine, liquide et exigible.

la créance doit être certaine :

ce qui signifie qu'elle doit avoir une existence actuelle et incontestable.

 

la créance doit également être liquide : 

Cela signifie que son montant doit pouvoir être évalué.

 

la créance doit enfin être exigible, c'est-à-dire échue.

Le créancier ne peut recouvrer une créance avant son terme, ni une créance assortie d'une condition suspensive qui ne serait pas réalisée.

 

 

2°) Les délais de prescription :

Un créancier négligeant subira les effets de son inertie.

 

En effet, la créance ne doit pas être prescrite, ni éteinte au moment de sa mise en recouvrement.

 

Le droit de recouvrer une créance est ainsi soumis à prescription.

 

Celle-ci est variable en fonction du type de la créance.

 

En matière civile, le délai de droit commun est de trente ans, sous réserve de prescriptions plus courtes selon le litige. En matière commerciale, c'est-à-dire les créances nées entre commerçants pour les besoins de leur commerce, le délai pour agir est de dix ans, en application de l'article L 110-4 alinéa 1er du Nouveau Code de Commerce. Il est insisté sur l'impérieuse nécessité d'agir vite, d'une part en raison de certaines prescriptions qui peuvent être très courtes, et d'autre part, compte-tenu du risque d'insolvabilité du débiteur.

 

Il faut réserver le cas particulier des créances de loyers et de salaires qui se prescrivent par cinq ans.

 

 

III- Quelles sommes peuvent être recouvrées ?

Le débiteur est tenu de régler :

 

  • - le principal de la créance,
  • - les intérêts moratoires qui courent en général à compter de la mise en demeure, en application de l'article 1153 du Code Civil : ces intérêts sont dits légaux.

Ces intérêts de retard peuvent également être conventionnels, c'est-à-dire résulter dans leur principe et leur mode de calcul d'une convention passée entre le créancier et le débiteur.

Il s'agira souvent de conditions générales de vente ou de service, approuvées par le débiteur.

 

  • - les dommages-intérêts :

Ils peuvent être fixés par le Juge à la demande du créancier poursuivant ou être initialement prévus par les parties dans la clause pénale.
Toutefois, en application de l'article 1152 alinéa 2 du Code Civil, le débiteur peut obtenir du Juge qu'il la minore s'il démontre qu'elle est manifestement excessive.

 

  • - les dépens comportent le coût de l'assignation et les frais de greffe au Tribunal de Commerce.

En matière civile devant le Tribunal de Grande Instance, ces dépens sont calculés selon un barème qui est à la charge de la partie qui a perdu le procès.

 

Conclusion

Voici donc dressé l'arsenal donné au créancier pour recouvrer sa créance par les voies légales et judiciaires.

 

Toutefois, afin de faciliter un recouvrement de créance, il est vivement conseillé au créancier de se décider rapidement à y procéder et de se faire préalablement conseiller sur la stratégie à adopter en fonction de la créance impayée et des caractéristiques juridiques et patrimoniales du débiteur de celle-ci.